• Ce qu'est la pastorale souletine

    La pastorale basque est le théâtre traditionnel du Pays de Soule. Elle appartient essentiellement au genre épique : son caractère fondamental est de conter une épopée. 

    Théâtre de plein air et amateur, la pastorale rassemble chaque année la population d'un village ou d'un petit groupe de villages.

    Autant qu’une pièce de théâtre, c’est une grande fête villageoise.

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Photographies de pastorales

Photographies de pastorales

 

Les photographies les plus anciennes mises en ligne par la Musée Basque et de l'histoire de Bayonne illustre la pastorale Le patriarche Abraham, jouée en 1899 à Tardets par le village de Haux. Les représentations de pastorales ont ensuite été régulièrement photographiées à partir du début du XXe siècle, par des amateurs et par des professionnels qui revendaient ensuite leurs clichés :

 

 

 

Les représentations racontées par Georges Hérelle

Les représentations racontées par Georges Hérelle

 

A partir de 1899, Georges Hérelle assiste à plusieurs représentations de pastorales. Domicilié à Bayonne, il se rend à Mauléon en train puis se déplace jusqu'au village souhaité par le tram qui dessert Mauléon jusqu'à St Engrâce. Souvent, Léopold Irigaray avertit Hérelle de telle ou telle représentation à venir par lettre ou encore par télégramme. Il pouvait arriver que le télégramme arrive la veille pour le lendemain, c'est le cas pour le courrier envoyé le 16 octobre 1909 pour la représentation du lendemain, le 17 octobre 1909 à Mauléon.

Télégramme d'Irigaray à Hérelle - Médiathèque de Bayonne, Ms.652_04_1910

Lorsque Hérelle a la chance de pouvoir assister à la représentation (parfois il ne s'y rendait pas à cause du mauvais temps), il décrit la journée de pastorale dans son intégralité : l'arrivée au village, la cavalcade, les gradins, la scène, le nombre d'acteurs...

 

"Je pars de Mauléon le lundi matin par le tram-way, avec une multitude de personnes, surtout des jeunes gens et des enfants, des jeunes filles aussi, - plus de 150 peut-être - qui vont comme moi voir la pastorale d'Ossas. La plupart d'entre eux portent un paquet, un panier, un sac où est enfermé leur déjeuner, et plusieurs ont une petite outre pleine de vin. Je remarque parmi cette foule deux prêtres"

Pastorale Jeanne d'Arc jouée à Ossas le 28 mars 1910, Ms.112_05

 

 "Scène carrée, ayant approximativement 10 mètres de côté (mesurés avec ma canne). Devant, petit escalier de dix marches. La scène posée sur des futailles soutenant des solives."

Pastorale Abraham jouée à Ordiarp le 31 mai 1909

 

Hérelle prenait des notes sur tout ce qu'il voyait puis classait ses notes parmi ses archives. C'est avec beaucoup de rigueur qu'il décrivait les représentations qu'il voyait, il a ainsi détaillé les costumes, les couleurs présentes sur scène, les accessoires des acteurs, les gestes et les chorégraphies des acteurs de chaque camp. Du fait qu'il n'était pas bascophone, et même si Léopold Irigaray lui traduisait souvent les pièces, Hérelle ne prêtait pas attention au texte de la pastorale, mais bien à son interprétation.

Dessin de George Hérelle. Médiathèque de Bayonne - Ms.112_02

 

"La récitation du prologue commence, au milieu de la scène, près du petit escalier. A chaque verset, il se déplace (à droite, au milieu, à gauche, au milieu etc). Il ne fait pas, après la récitation de la strophe, le tour sur lui-même que j'ai vu faire en pareille circonstance à Haux et à Tardets. [...] Pendant la récitation de la strophe, le prologueur se tient immobile; mais à la fois il lève les deux bras en l'air."

Pastorale Hélène de Constantinople jouée à Chéraute le 10 mai 1908, Ms.112_03

 

Les témoignages de personnes ayant assisté aux pastorales étant assez rares à cette époque, les écrits de Hérelle sont d'une grande valeur. En plus de renseigner le lecteur sur les conditions de représentations des pastorales, Hérelle parvient par ces écrits à nous transporter à son époque, du fait de son écriture fluide, de son talent d'observateur et d'illustrateur.

Médiathèque de Bayonne Ms.112_04 Médiathèque de Bayonne Ms.112_05 Médiathèque de Bayonne Ms.112_06

 

Consulter les archives de Georges Hérelle :

Ces archives recèlent des observations directes sur des représentations auxquelles il a assisté, parfois simplement des documents (cartes postales, photographies, programmes) qu'il a recueillis et légendés ou commentés.

Pastorales Abraham (Haux et Tardets), 1899, et Jean de Calais (Licq), 1901. Notes et commentaires de G. Hérelle sur les représentations.

Pastorales Abraham (Haux et Tardets). 1899. Photos, cartes postales, dessins avec commentaires de Georges Hérelle

 

Représentation de la pastorale Hélène de Constantinople jouée à Chéraute le 10 mai 1908 :

Cartes postales

Notes et commentaires de Georges Hérelle

 

Représentation de la pastorale Üscaldünac Ibañetan jouée à Tardets le 31 août 1908 :

Photographies, cartes postales et commentaires de Georges Hérelle

Notes de Georges Hérelle et articles de presse

 

Pastorale Abraham, Ordiarp, 1909 :

Photos, cartes postales, dessins avec commentaires de Georges Hérelle

Notes et commentaires de Georges Hérelle

 

Pastorale Hélène de Constantinople (Mauléon - filles d'Ordiarp). 1909, Notes et commentaires de Georges Hérelle sur la représentation

 

Pastorales Hélène de Constantinople et Roland (Ordiarp) - Les quatre fils Aymon (Menditte), 1909 Photos, cartes postales, dessins avec commentaires de G. Hérelle.

 

Représentation de Jeanne d'Arc à Ossas en 1910 :

Cartes postales et commentaires de Georges Hérelle

Notes et commentaires de Georges Hérelle sur la représentation

 

Pastorale Mustapha le grand Turc, Barcus, 1910

 

Représentation de la pastorale Napoléon à Lacarry en 1910, cartes postales, dessins et commentaires de Georges Hérelle

 

Représentation de la pastorale Astyage à Laguinge en 1914

 

Représentation de la pastorale Abraham à Menditte en 1922

 

Représentation d'Alexandre à Trois-Villes en 1923

 

 Maider Bedaxagar

Les plus anciens manuscrits de pastorales

Les plus anciens manuscrits de pastorales

 

Les plus anciens manuscrits de pastorales souletines connus sont du XVIIIème siècle, la plus ancienne référence d'une pastorale souletine traditionnelle, celle de sainte Elisabeth de Portugal (Bibliothèque du Musée Basque), datant du milieu du siècle*. Elle fut représentée à Esquiule le 3 janvier 1750, son régent copiste se présentant sous le nom de Jauliber. C'est ce qu'indique la mention qui apparaît en fin de manuscrit :

Manuscrit Sainte Elisabeth de Portugal. MBHB, Ms.14 

Fait à Ezkioula le trois janvier 1750

Ceux et celle qui touveron le presant

Seront prié deremettre a moy à jauliber

De la ditte commune il leur sera recompence

< > leur <peine?>

 

Le cahier qui porte cette mention a été écrit par deux mains différentes. Si le fragment où elle apparaît remonte à cette année ainsi que la représentation mentionnée, il n'en est pas obligatoirement de même pour le reste du manuscrit, écrit par une autre main, car, comme indiqué précédemment, il arrivait que les pastoraliers réaménagent les copies selon leurs besoins et associent pour cela des fragments appartenant au départ à des cahiers différents, écrits à des dates différentes. Seule la datation du papier, dans la mesure où elle peut être établie, est en mesure dans de tels cas de fournir des indications véritablement fiables.

 

Dans le passé, d'autres manuscrits ont été mentionnés comme étant plus anciens. On a évoqué le témoignage de J-A Buchon concernant un manuscrit de l'an 1500, acheté vers 1840 à Tardets, et qui a été perdu, sans que nul autre ait pu examiner de plus près une datation aussi peu vraisemblable, et qui reste par conséquent sans valeur.

Le manuscrit de Jeanne d'Arc (Bibliothèque du Musée basque) a longtemps été considéré comme étant le plus ancien, car G. Hérelle y avait lu la date de 1723 dans le filigrane du papier. Un examen rigoureux effectué par une spécialiste il y a quelques années a montré que la date en filigrane n'était pas 1723 mais 1793. 

Un manuscrit de saint Jacques a également donné lieu à discussions. Ce manuscrit (Bibliothèque nationale de France) date du XIXème siècle et son copiste est connu, puisqu'il s'agit de JP Saffores (celui à qui Buchon acheta le manuscrit de Clovis, et dont on a rapporté le mot à propos de lui-même plus haut). A première vue, la date de représentation figurant dans ce manuscrit semble pouvoir être lu 1634. C'est la raison pour laquelle, Hérelle avait pensé qu'en ce cas Saffores n'avait pas indiqué la date de la représentation où il devait être régent, mais celle figurant sur un autre manuscrit dont il s'était inspiré ou qu'il avait copié pour établir sa copie. Ce n'est pas là l'usage dans la tradition des pastorales et on ne connait pas d'autre exemple de ceci qui soit attesté. Mais en indiquant le lieu et la date de représentation les chiffres de l'année sont dessinés de telle manière que l'année 1834, semble être écrite 1634, comme on le voit dans la reproduction jointe. Il a donc été suggéré que cette datation avait été copiée par Saffores d'un manuscrit source plus vieux de deux siècles et portant cette date, bien que la copie des dates de représentations antérieures ne fasse pas partie des usages dans la tradition. Quoi qu'il en soit, lorsque l'on examine attentivement le manuscrit, la lecture de Hérelle n'apparaît pas aussi sûre.

  
Manuscrit Saint-Jacques. Bibliothèque nationale de France    

On peut en effet faire une autre lecture, où le deuxième chiffre de l'année ne se lit pas 6, mais 8,  ce qui correspondrait à l'époque où Saffores exerçait. Que le lecteur se fasse lui-même son opinion, après avoir observé ci-dessous la reproduction de la date contestée et en avoir comparé le deuxième chiffre avec le 8 à côté reproduisant un 8 du même manuscrit.

Une observation attentive du deuxième chiffre, montre que la boucle du bas du second chiffre vu comme un 8 se réduit en un point indiquant un croisement dans le dessin. Dans cette lecture, bien que les résultats des tracés soient sensiblement différents, le mouvement suivi pour tracer ce chiffre est identique à celui du dessin du 8 mis en comparaison.

 

C'est la raison pour laquelle, la pastorale jouée à Esquiule en 1750 peut être considérée en l'état actuel des connaissances et de la documentation comme l'attestation la plus ancienne d'une représentation relevant de cette tradition dramatique en Pays Basque.

B. Oyharçabal

La préservation des manuscrits anciens

La préservation des manuscrits anciens

 

C'est grâce à la prudence et la sagesse de quelques érudits (notamment A. d'Abbadie, G. Hérelle, J. Vinson, W. Webster) que la plupart des manuscrits anciens qui nous sont parvenus ont été préservés, en nombre relativement important dans le contexte de la littérature basque, et à plus forte raison souletine, puisque Hérelle les évaluait à environ deux cents.

         
Manuscrit Hélène de Constantinople - Médiathèque de Bayonne, Ms13   Manuscrit Roland ou les 12 pairs de France - Fonds privé, FPPDS_PA05

En effet, ces spécialistes, conscients du danger qui menaçaient ce patrimoine, acquirent ces manuscrits pour les déposer dans des bibliothèques publiques, principalement, à la Médiathèque de Bayonne, la Bibliothèque municipale de Bordeaux et la Bibliothèque nationale de France à Paris (entre les deux guerres, la Bibliothèque du Musée Basque reçut également un important dépôt de manuscrits, confiés par Mme Campan-Latsague, petite fille d'un régent du XIXème siècle, puis plus tard un autre de Mme Malartic). Aujourd'hui, grâce aux progrès techniques qui bouleversent le monde de la documentation, il est possible d'en offrir des copies numérisées accessibles à chacun, sans que les documents eux-mêmes aient à souffrir de cette diffusion.

Manuscrit Roland - BM Bordeaux, Ms1695-17

Bien sûr, il existe également dans certaines maisons souletines des cahiers de pastorales anciennes. Lorsque les propriétaires sont conscients de la valeur patrimoniale de ces cahiers, ils veillent à leur préservation. Mais, ces manuscrits restent alors difficilement accessibles, et il est à espérer que, dans leur cas également, la numérisation permettra leur divulgation, sans que leur bonne conservation soit pour autant empêchée. Cela est par exemple le cas des cahiers appartenant à une bibliothèque privée, dont le propriétaire a accepté qu'ils fussent numérisés et rendus accessibles sur ce site.

Lorsqu'à l'inverse les propriétaires ignorent la valeur de ces cahiers, ou bien même leur existence, il est fort à craindre, que les manuscrits soient en grand danger de disparition définitive, comme cela a dû être le cas pour des dizaines de cahiers au cours des décennies passées. Déjà au milieu du XIXème siècle, W. Webster, folkloriste anglais qui fut l'un des premiers à avoir attiré l'attention sur le théâtre souletin, assurait qu'en une douzaine d'années entre 1864 et 1877, il avait personnellement été le témoin de la disparition de deux collections, l'une, fort importante, dissipée, et l'autre brûlée par la fille, héritière du régent qui en était le possesseur. On sait également que l'une des familles de pastoraliers des plus connues au XXème siècle, celles des Heguiaphal, perdit une quarantaine de cahiers lors de l'incendie de leur maison à Chéraute en 1898.

Des pertes ont également été constatées lorsque les collections avaient été acquises et conservées par des érudits. C'est ce qui est advenu par exemple, selon les conclusions de l'enquête menée à ce sujet par G. Hérelle, au manuscrit de Clovis, acquis par un inspecteur général des archives et des bibliothèques du XIXème siècle, J-A. Buchon, lors d'un passage en Soule où il put assister à une représentation des Trois Martyrs à Sainte-Engrâce en 1839. Ce spécialiste estimait que le manuscrit qu'il avait acquis auprès de l'un des plus réputés régents de ce temps, Saffores à Tardets, datait de l'an 1500, datation peu vraisemblable et très suspecte qui ne peut être vérifiée et donc sérieusement retenue du fait précisément de la perte du document.

B. Oyharçabal

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