Bibliographie et ressources

 

Ouvrages à propos des pastorales (numérisés)

  • Le Théâtre comique : Chikitoak et koblak - Mascarades souletines - Tragi-comédies de carnaval - Sérénades charivariques - Parades charivariques - Farces charivariques / Georges Hérelle. Consultable sur Bilketa
  • Les pastorales à sujets tragiques considérées littérairement : ouvrage orné d'un fac-similé de manuscrit, d'une figure documentaire et de nombreuses illustrations (vignettes et culs de lampe) reproduisant des motifs ornementaux de style basque. I, Technique des pièces. II, Histoire du répertoire / Georges Hérelle. Consultable sur Bilketa
  • Le répertoire du théâtre tragique, cycles de l'ancien testament, du nouveau testament, de l'hagiographie, de l'antiquité profane, des chansons de geste, des romans d'aventures et de l'histoire légendaire : catalogue analytique, description des manuscrits, analyse des sujets traités, indication des sources, bibliographie des pièces composées sur les mêmes sujets pour d'autres théâtres ruraux / Georges Hérelle. Consultable sur Bilketa
  • Les Théâtres ruraux en France (langue d'oil et langue d'oc) depuis le XIVe siècle jusqu'à nos jours : Annexe aux études sur le théâtre basque / Georges Hérelle. Consultable sur Bilketa
  • Une pastorale basque, Hélène de Constantinople. Étude historique et critique d'après des documents inédits avec textes et traduction / Albert Léon. Consultable sur Bilketa

 

Sur le Web

  • Temps, rite, histoire : la pastorale souletine, un théâtre de la tradition basque. Conférence de Véronique Inchauspé (2000). Enregistrement sonore accessible sur la base Calames des universités
  • Biographie de Georges Hérelle, publiée par GARAE (Groupe Audois de Recherche et d'Animation Ethnographique)

Georges Hérelle, l'ethnographe

 

Né le 27 août 1848 à Pougy-sur-Aube, près de Troyes, Georges Hérelle est professeur de philosophie. A la rentrée 1896, cet ancien élève du lycée Louis-le-Grand, primé au concours général, est nommé au lycée de Bayonne. Il a 48 ans, il vient de Cherbourg. L’enseignement n’est pas sa vocation : en 1903, il obtient un congé sans solde ; en 1905, un départ anticipé à la retraite.

Sa passion véritable, ce sont les langues. Traducteur de l’écrivain italien Gabriele d’Annunzio (1863-1938) et du romancier valencien Blasco Ibañez (1867-1928), il reçoit en 1897 le prix Langlois de l’Académie française pour sa traduction de Le Vergini delle rocce (Les Vierges au rocher, Calmann-Lévy, 1897) de d’Annunzio[1].

Georges Hérelle dans son cabinet de travail, vers 1905. Photographie de Labat. Médiathèque Grand-Troyes - Ms3494

 

Il s’intéresse aux langues, pas au basque. Pendant trois années, la langue basque reste inaperçue. Elle ne fait pas partie du mobilier du monde. C’est à la faveur d’une banale conversation avec un collègue du lycée qu’il entrevoit cette culture de tradition orale, et son joyau : les pastorales.

C’était au mois de mars 1899. J’habitais Bayonne depuis trois ans et je n’avais jamais entendu parler d’un théâtre basque. Le Pays Basque n’était pas encore à la mode, et personne ne s’intéressait à ce qui s’y passait.

Un jour, en sortant du Lycée, comme je causais avec mon collègue et ami M. Leclerc, professeur d’espagnol, il fit allusion aux représentations de pastorales souletines.

Les pastorales souletines ? Qu’est-ce que c’est ? - lui demandai-je, étonné de ce nom inconnu.

Ce sont des pièces de théâtre que jouent de temps à autre, sur la place publique, les jeunes gens de la vallée de la Soule.

Cela doit être intéressant.

Non. Les sujets des pièces sont de vieilles légendes bibliques ou hagiographiques, bonnes pour amuser des enfants, et les acteurs sont des garçons illettrés qui, affublés de costumes ridicules, débitent leurs rôles sur un ton de cantilène, avec des gestes maladroits.

Ce que vous me dites de ce singulier spectacle ne m’ôte point l’envie de le voir. Donnera-t-on bientôt une représentation ?

Je n’en sais rien. Mais j’ai dans la vallée de la Soule, à Licq, un beau-frère, M. Goux, qui, le cas échéant, voudra bien prendre la peine de m’avertir. [2]

 

Un mois plus tard, le voici à Haux, dans le canton de Tardets, spectateur enthousiaste d’Abraham. C’était le 16 avril, et c’est pour lui une révélation :

J’étais revenu séduit et comme enivré par la singularité de ce spectacle et surtout par son caractère archaïque. Sans rien connaître encore de l’origine des pastorales, j’avais senti confusément qu’il y avait là quelque chose de très ancien, qui méritait d’être étudié. Ce sentiment prévalut contre toutes les objections que l’on me fit, lorsque je parlai à mes amis d’écrire quelque chose sur ce théâtre. [3]

Dès ce moment, l’étude des pastorales sera pour G. Hérelle une constante : l’objet d’une curiosité méthodique nourrie aux principes de l’analyse littéraire, de l’exégèse théâtrale et de l’enquête ethnographique. Il assiste à une dizaine de représentations, consigne d’innombrables remarques dans ses carnets de terrain, se dote d’un questionnaire de huit pages conçu sur le modèle des enquêtes ethnographiques qui font autorité. [4]

Par le biais de ce travail pionnier, Georges Hérelle fait son entrée dans la famille hétéroclite des « monographes intrépides et consciencieux » [5] qui, sans nécessairement tous maîtriser la langue basque, portèrent leur intérêt sur des comportements sociaux tellement familiers en Pays Basque que personne ne les remarquait, et sur lesquels ils portèrent un tel intérêt qu’ils en firent des marqueurs identitaires basques avant d’y voir, dans un second temps, des « traits de culture ». Citons, pêle-mêle, les J.-F. Bladé, J.-A. Buchon, A. Chaho, W. d’Abartiagues, J. Vinson, W. Webster, J.-P. Duvoisin, R. Gallop, H. Gavel, F. Michel, Ch. Bordes, V. Alford, J.-B. Daranatz ou J. Ithurriague qui, comme Georges Hérelle mais à une génération d’intervalle, enseigna au lycée de Bayonne.

Denis Laborde

Plus d'informations sur Georges Hérelle

 

1. Giovanni Gullace, Gabriele D'Annunzio in France: A Study in Cultural Relations, Syracuse University Press, 1966.

2. « Comment l’idée m’est venue d’étudier le théâtre basque », Bulletin du Musée basque, Numéro spécial Hommage à Bayonne et au Pays Basque, 1932, p. 321.

3. Idem, p. 323.

4. Georges Hérelle, Les Pastorales basques, notice, catalogue des manuscrits et questionnaire, Vitry-le-François, Imprimerie de P. Tavernier, 86p. Réédition Nîmes, C. Lacour, 2002.

5. Pierre Lafitte, Les Etudes basques à travers les siècles, Bayonne, Ed. du Musée Basque, 1932, p. 9.

Georges Hérelle et ses "informateurs"

 

Jean Héguiaphal

Georges Hérelle ne parlait pas basque, mais il sut s’entourer des meilleures compétences pour comprendre « de l’intérieur » ce monde de la pastorale qu’il déchiffrait. En commençant par le premier d’entre eux, Jean Héguiaphal, de Chéraute, fils et petit-fils, père et grand-père d’errejent, « instituteur de pastorale » de son état. Instituteur au sens de celui qui instruit, et qui instruit de deux manières : d’une part, en enseignant les pastorales aux villageois impliqués dans la performance ; d’autre part en menant l’enquête, chaque thème de pastorale constituant un cas à instruire.

J. Héguiphal est pour G. Hérelle un informateur de tout premier ordre, c’est sa caution culturelle. Lorsqu’on parcourt les manuscrits de Georges Hérelle, il n’est pas rare en effet de lire, sous la plume du philosophe, des commentaires sur les analyses que lui propose Héguiaphal, comme cet « important pour l’histoire des pastorales »[1] consigné à l’encre rouge sur une lettre de 8 juin 1901.

 

Léopold Irigaray

Demeure la distance à la langue et, cette fois, c’est grâce à Léopold Irigaray que Georges Hérelle a accès à cet univers de savoir si singulier qui est celui des errejent, et qu’il a accès aussi aux textes des pastorales. L. Irigaray, jeune souletin averti, né à Pau en 1875, vivant à Licq-Atherey et qui décèdera à Garindein en 1951, sera son guide dans cette langue inaccessible. C’est bien grâce à lui que G. Hérelle aura pu conduire sur les pastorales les analyses de contenu que nous lui connaissons. La boucle se referme alors sur un curieux effet de miroir. Ce traducteur qu’Hérelle aura lui-même été pour d’Annunzio ou Ibañez, c’est Irigaray qui le serait pour lui, lui ouvrant, grâce à sa compétence et à ses connaissances, et grâce à une amitié de près de vingt ans, ce monde basque de la pastorale.

Dans cet espace de la traduction, se forme un de ces couples familiers des enquêtes ethnographiques, couple « constitué par l’ethnographe et son informateur (ou médiateur ou énonciateur de sa culture…) rappelant tant d’autres situations similaires dans l’histoire de l’ethnologie »[2]. C’est par cette alliance scellée entre des univers de culture distincts et des compétences partagées que G. Hérelle aura pu écrire au total près de 700 pages qui culminent avec l’opus magnum de 1925[3] et qui font de lui le premier historien du théâtre basque.

 Denis Laborde

Correspondance de Léopold Irigaray avec Georges Hérelle

La Médiathèque de Bayonne et le Musée Basque et de l'histoire de Bayonne conservent les nombreux courriers envoyés par Irigaray à Hérelle, classés par année :

1899           1900           1901           1902           1903           1904           1905
1906   1907   1908   1909   1910   1911   1912
1913   1914   1915a   1915b   1916   1917   1918
1919   1920   1921   1922   1923   1928   Sans date

 

1. Fonds Hérelle, Lettre de Léopold Irigaray datée du 8 juin 1901

2. Daniel Fabre, Inversion et dislocation : les vies savantes de Georges Hérelle, Paris, Ed. du CTHS, à paraître

3. Georges Hérelle, "Etudes sur le théâtre basque", Bulletin de la Société des Sciences, Lettres et Arts et d’Etudes régionales de Bayonne & Paris, Honoré Champion.

George HERELLE

 

                       
MBHB   MBHB-2015.0.375   MBHB

 

Né en 1848 et mort en 1935. Il est surtout connu en Pays Basque en raison de ses nombreuses études sur le théâtre populaire basque, réalisées alors qu'il ignorait pourtant la langue. Il vint en effet en Pays basque en fin de carrière, en 1896, à près de 50 ans, et c'est là qu'il choisit de mourir à 87 ans, dans son domicile bayonnais, rue Vieille Boucherie. Il fut aussi le traducteur privilégié de Blasco Ibañez et surtout de G. D'Annunzio qu'il fit connaître en France, et avec lequel il entretint des liens d'amitié.

Ses travaux  de recherches et réflexions sur l'homosexualité, à une époque où ce thème était d'abord difficile, furent moins connus, car ils restèrent inédits, ou publiés sous pseudonyme.

Pour en savoir plus sur George Hérelle

 

Raymond ou Erramun TARTACHU

Raymond (en basque Erramun) Tartachu est né le 3 juillet 1923 à Ordiarp, à la maison Utigerrenborda ; ils étaient deux frère et soeur. Il a fréquenté l'école publique d'Ordiarp jusqu'à l'âge de 13 ans. Il a ensuite travaillé à la petite exploitation agricole familiale (vaches, brebis) mais surtout comme ouvrier dans l'industrie de la sandale à Mauléon (Elissabide et la marque Pataugas, caoutchoutiers Gema). Il a pris sa retraite à 58 ans.


Erramun s'est intéressé à la danse souletine dès 1936 : au lendemain des mascarades données cette année-là à Ordiarp, il se mit à essayer de reproduire les fameux entrechats (frijatak). Il eut comme maître à danser Alale Arricau de la maison Ahetzenborda du quartier Lambarre, sachant qu'il y avait également à cette époque d'autres maîtres à danser connus dans le village (André Chilope, Petti Aguerre, Clément Lastère, Pierre Bergeotte). Les danseurs d'Ordiarp se produisaient lors des mascarades et des pastorales (mascarade en 1949, pastorale en 1950), mais aussi en dehors du village, notamment les cinq meilleurs danseurs de la mascarade (aintzindariak), situés en tête du cortège. A l'occasion, ils aimaient aussi prendre conseil auprès de vieux danseurs de Barcus et de Chéraute.

Erramun a commencé à enseigner les danses souletines à partir de 1960, à Ordiarp mais aussi parfois en dehors (Musculdy où il fit renaitre le goût de la danse, Bunus). La dernière mascarade d'Ordiarp dont il fut le maître à danser date de 1982. Les pastorale et mascarade qu'il dirigea à Musculdy sont respectivement de 1985 et 1987.

Erramun Tartachu a bien connu Jacques Larrondo, né comme lui à Ordiarp en 1926 et danseur, ayant quitté le village à 27 ans pour travailler à Pau. Jacques Larrondo contribua à partir des années 1970 au renouveau de la danse souletine (fondation de Xiberoko Zohardia en 1972), essayant de convaincre les anciens de jouer, à l'image de Erramun Tartachu, le rôle d'éducateurs auprès des jeunes gens.

 

Jean-Fabien LECHARDOY

Jean-Fabien Lechardoy est né en 1952. Après avoir été à l'école de Barcus, il poursuit ses études au collège Saint-François de Mauléon, puis devient apprenti boucher-charcutier à Oloron. Après avoir exercé toute sa vie à la boucherie-charcuterie familiale, il est aujourd'hui à la retraite.
À vingt ans, il apprend les pas de danse auprès de ses oncles Alexis Üthürry "Larranda" et Jean-Pierre Üthürry "Artaguiet", et de son grand-père, accompagné du txülülari Alexis Picotchet. Le groupe de cinq danseurs issu de cette formation prend part à la pastorale Etxahun Barkoxe deux ans plus tard, en 1974, et fonctionne ainsi pendant 7 à 8 ans.
Jean-Fabien enseigne la danse pendant quinze ans. Il s'implique dans la vie culturelle de Barcus à travers les mascarades, les diverses sorties en groupe, les pastorales, dans l'association culturelle Etxahun et depuis 1998, comme errejent (metteur en scène) de pastorale.
En transmettant son savoir, il participe à la continuité et au renouvellement des pratiques culturelles qui unissent les souletins.

 

 

Jean-Pierre RECALT

Jean-Pierre Recalt est né le 13 avril 1952 à Saint Estèphe (Gironde). Ses parents travaillaient dans le vignoble.
La famille revient à Alçay lorsqu'il est âgé de 6 mois. Jean-Pierre a deux frères et une soeur.
Il débute sa scolarité à l'école privée d'Alçay. L'abbé Errezarret qui y donne des cours, joue un rôle prépondérant dans l'initiation des jeunes à la danse et au chant, ainsi qu'à leur sensibilisation à la langue et la culture basques.

Grâce à l'abbé Marcel Errezarret, et accompagné de Pierre Aguer Garat Arhane, joueur de tambour et maître de danse renommé, Jean-Pierre apprend donc à danser, et participe pour la première fois à la mascarade en 1970, en tant que Txerrero. Dès lors, il commence à son tour à enseigner.

À Alçay, mascarades (1970, 1976, 1991, 1998) et pastorales (1973, 1989, 1999) se succèdent. Accompagnés des musiciens P. Aguer "Garat Arhane" et Pierre Bordaçarre Etxahun-Iruri, le groupe d'Aitzindari, les cinq meilleurs danseurs, sont sollicités de toutes parts, comme le sont d'ailleurs les danseurs souletins en général, dont la technique de danse attire la curiosité des danseurs non souletins.

Au cours de son riche parcours, Jean-Pierre est devenu l'un des errejent de pastorales les plus prolifiques de Soule. Depuis 1991, il est metteur en scène de treize pastorales.

Il possède une connaissance solide, précise et pointue de la danse et des pratiques dansées souletines, qu'il est toujours prêt à communiquer et à transmettre.
Le témoignage de Jean-Pierre Recalt nous mène à Alçay, autre fief des pratiques dansées souletines, parmi notamment Barcus, Ordiarp, Chéraute et Tardets. Au cours de son riche parcours, il évoque le chant souletin, la danse, la mascarade et la pastorale souletines, faisant référence aux personnes hors du commun qu'il a connues